L'agriculture biologique est un mode de culture basé sur l'observation et le respect des lois de la vie, qui consiste à nourrir non pas directement les plantes avec des engrais solubles, mais les êtres vivants du sol qui élaborent et fournissent aux plantes tous les éléments dont elles ont besoin (C. Aubert, l'agriculture biologique, Paris, Éd. Le courrier du livre, 1970).
D'un point de vue législatif, l'agriculture biologique est un mode de culture réglementé, comprenant des pratiques autorisées ou interdites, consignées dans des cahiers des charges officiels. Les producteurs sont soumis à des contrôles annuels et leur production est ensuite certifiée. Ils peuvent alors apposer le label AB sur leurs emballages.
L’appellation biologique peut être délivrée à des produits agricoles, à des produits de l’élevage et à des produits transformés. Depuis peu, il existe également des produits cosmétiques et des produits d’entretien biologiques.
Ce mode de culture diffère radicalement de l’agriculture conventionnelle et de l'agriculture raisonnée, d'abord pour des raisons techniques, parce qu'il évite totalement les pesticides et engrais chimiques de synthèse, vraies causes des problèmes de pollution agricole actuels. Ensuite, et principalement, parce qu’il repose sur une conception globalement différente du travail de l’agriculteur.
Le « vrai » producteur bio est en effet avant tout un paysan : son exploitation est de petite taille et tend à intégrer plusieurs activités : polyculture élevage, productions multiples et complémentaires, transformation à la ferme, vente directe… L’agriculteur bio s’inscrit dans un projet de société global : son engagement est fondamentalement un engagement politique au sens citoyen du terme, et son action a une visée écologique et sociale à long terme.
Une agriculture critiquée
L'agriculture biologique est souvent perçue comme un mode de production beaucoup moins polluant et créateur de produits sains et savoureux, mais dont la productivité plus faible empêche tout sérieux développement d'avenir. Cette critique est principalement émise par les producteurs d'engrais minéraux, de produits phytosanitaires, et par l'industrie des biotechnologies alimentaires…
Un autre reproche, plus subtil, est l'aspect soi-disant non scientifique de sa démarche, qui serait un mélange d'empirisme plus ou moins réussi et de « solutions » dont l'efficacité n'est pas prouvée ou reconnue par la science « officielle » (l'exemple le plus spectaculaire étant le respect et le suivi des rythmes cosmiques durant les travaux agricoles, prôné par la Biodynamie).
Une agriculture qui dérange
En fait, au delà de ces critiques, « l'agri bio » dérange pour au moins deux raisons :
– Remise en cause totale de quasiment tous les intervenants de la chaîne de production agroalimentaire : exploitations agricoles surdimensionnées et suréquipées, industries chimique et agroalimentaire, grande distribution…
– Une agriculture d'économie qui intéresse peu l'économie : la pratique du compost, le refus des pesticides de synthèses, la sélection de variétés peu gourmandes en eau… Tous ces judicieux principes qui ménagent l'environnement, n'intéressent pas beaucoup une machine économique hypertrophiée à la recherche permanente de production systématique de biens et de services.
Une agriculture extrêmement sophistiquée
Citons simplement ici les principes les plus remarquables :
– Intégration avant l'heure des principes du développement durable : l'agriculteur à aussi pour rôle le maintien d'une « écologie de campagne » en contribuant à maintenir un tissu rural riche et vivant - un concept repris récemment par les dernières lois agricoles (exemple : Les CTE).
– Respect et application des lois écologiques fondamentales (biodiversité, complémentarité sol-plante, durée des procédés naturels, etc.) .
– Développement de normes ou de principes innovants, dont cherchent à s'inspirer actuellement d'autres modes d'agriculture ou de production : traçabilité, lutte biologique intégrée, etc.
– Innovation permanente dans la lutte contre la dégénérescence des espèces, les parasites, etc.
Une agriculture performante
Si l'on tient compte des fonctions économiques, environnementales et sociales que devrait remplir tout mode de production agricole sain, l'agriculture biologique est extrêmement performante : dans certains cas, sa production peut atteindre et même dépasser les quantités produites par les méthodes « chimiques » de production, et ce, tout en restaurant les paysages et en faisant vivre plus de personnes à l’hectare que l’agriculture conventionnelle.
A long terme, elle est très performante également car elle préserve la vie des sols et des êtres vivants. La conversion de la totalité des terres agricoles françaises à la bio permettrait de procurer une source de revenus à des dizaines et des dizaines de milliers de familles.
Une nouvelle étape
Reconnue depuis 1992 seulement par les instances officielles, l'agriculture « bio » profite d'une croissance légitime, mais doit affronter de nombreux défis :
– Pression des industries de biotechnologies dont la politique commerciale agressive et expansionniste menace gravement la survie des agricultures paysannes écologiques du monde entier, alors que leurs produits (semences OGM) n’apportent pas les solutions promises (les gains de productivité ne sont pas au rendez-vous, la consommation d’intrants chimiques augmente à nouveau après quelques années), et que les agriculteurs rechignent de plus en plus à perdre leur autonomie au niveau des semences…
– Tentation permanente de réduire la bio à son seul volet agricultural et d'en faire un mode de production industrialisé avec pour seul souci une rentabilité immédiate maximale, d’où la tentation de fraudes et de réglementations au plus bas niveau.
– Globalisation économique actuelle qui incite fortement à une agriculture tournée vers l'export, et à une production mondiale agricole spécialisée par pays ou régions (Brésil pour la production d'aliments pour le bétail européen…), menaçant l’autonomie alimentaire de nombreuses régions et favorisant à long terme la désertification des terres agricoles.
– Sauveur Fernandez et Anne Andrault –
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